Le workshop innovation sâest dĂ©roulĂ© sur deux jours, dans le cadre du cycle Master Mutation du Cadre BĂąti Ă lâEcole de Design de Nantes. Il Ă©tait animĂ© en anglais par deux intervenants extĂ©rieurs : Damien Brosseau, Responsable Innovation Ă Okeenea et Marine Semichon, Consultante associĂ©e Ă Univaccess.
Le workshop avait deux objectifs pédagogiques principaux :
- ExpĂ©rimenter une dĂ©marche Design Thinking dans le cadre de lâapproche innovation du groupe Okeenea, en centrant lâexpĂ©rimentation sur le cĆur des demandes clients et des attentes usagers actuelles Ă savoir, lâinformation voyageur en situation dâintermodalitĂ© avec les problĂ©matiques usagers inhĂ©rentes Ă la situation perturbĂ©e.
- Faire bĂ©nĂ©ficier dâune dĂ©marche centrĂ©e sur lâempathie, lâexpĂ©rience et sur la dĂ©finition dâune rĂ©elle problĂ©matique usager.
1. Design brief
Le brief du workshop fournissait des instructions prĂ©cises aux Ă©tudiants, avec lâambition que ceux-ci puissent ainsi sâallĂ©ger des questions superflues, se concentrer sur lâessence du problĂšme identifiĂ© et ainsi maximiser leur potentiel crĂ©atif.
Choix du lieu dâĂ©tude
La Gare de Nantes, nĆud intermodal stratĂ©gique situĂ© dans une grande mĂ©tropole, prĂ©sentait lâensemble des critĂšres requis pour lâĂ©tude.
Sans heures creuses réelles, la gare doit en effet gérer des flux croisés permanents de voyageurs de types et de vélocités différentes et son taux de fréquentation connaßt une augmentation constante.
La gare offrait ainsi le terrain dâexpĂ©rimentation idĂ©al pour mettre en Ćuvre la mĂ©thodologie choisie, centrĂ©e sur le ressenti et lâempathie usager.
Des usagers à besoins spécifiques
Lors de lâĂ©laboration du brief du workshop, le choix sâest rapidement portĂ© sur les usagers en situation de handicap. Se baser sur les difficultĂ©s auxquelles se confrontent les usagers Ă besoins spĂ©cifiques met en effet davantage en exergue les problĂ©matiques rencontrĂ©es par lâensemble des utilisateurs. Lâune des consignes transmises consistait Ă Â partir des besoins particuliers dâun voyageur en situation de handicap, incarnĂ© par un persona, pour arriver, in fine, Ă un Ă©quipement dâinformation voyageur amĂ©liorant soit lâexpĂ©rience de ce type dâusager, soit celle de la population en gĂ©nĂ©ral.
2. Structure du workshop
Icebreaker et cadrage du workshop
Au lancement du workshop les 15 étudiants, répartis en 3 groupes, ont dû répondre à un court challenge dont les intentions étaient de :
- Prendre un temps pour sortir du cadre et permettre aux animateurs et Ă©tudiants dâapprendre Ă se connaĂźtre ;
- Amener les participants à changer de point de vue ;
- Communiquer les consignes de la premiĂšre phase du workshop
- Distribuer un scĂ©nario dâusage et un persona à chaque groupe pour cadrer davantage la phase dâempathie.
Etape 1Â : Empathie
La premiĂšre Ă©tape prenait la forme dâun voyage dâexploration Ă la Gare de Nantes sur une demi-journĂ©e. CâĂ©tait une phase cruciale du workshop, les Ă©tudiants devant glaner un maximum dâinformations qualitatives en prenant le temps de sâimmerger dans le lieu et dans le ressenti du persona, dâobserver, dâĂ©changer et dâinteragir avec les voyageurs et membres du personnel rencontrĂ©s sur place. Ces informations devaient ensuite former la matiĂšre premiĂšre de leur travail sur ces deux jours.
Les Ă©tudiants avaient emmenĂ© des Ă©quipements leur permettant de simuler les situations de handicap des personae. Lâempathie fut totale du fait des Ă©lĂ©ments fournis en amont : la description dĂ©taillĂ©e du persona (situation familiale, professionnelle, handicap, aides Ă la locomotion utilisĂ©es), le scĂ©nario dâusage comprenant des objectifs clairs Ă atteindre en Gare de Nantes et la nature des dysfonctionnements rencontrĂ©s par le persona sur le trajet.
Etape 2 : Inspiration â DĂ©finition de la problĂ©matique
Lâun des challenges de ce workshop Ă©tait pour les Ă©tudiants de prendre le temps de bien poser le problĂšme, fil dâariane du projet ; la tentation Ă©tant souvent grande de sauter les Ă©tapes pour aller rapidement Ă la solution.
Tout en conservant les groupes constituĂ©s dans la matinĂ©e, il leur a ainsi Ă©tĂ© demandĂ© de retranscrire leurs observations et analyses de la gare en les listant, puis en les regroupant par catĂ©gorie, tout en les amenant Ă se questionner sur les usagers rĂ©ellement concernĂ©s par les difficultĂ©s identifiĂ©es dans lâaccĂšs Ă lâinformation voyageur. La mĂ©thode des « 5 pourquoi » leur a permis dâarriver assez rapidement Ă caractĂ©riser le problĂšme racine.
Etape 3 : IdĂ©ation – crĂ©ativitĂ©
Une fois le problĂšme posĂ©, il leur a Ă©tĂ© demandĂ© dâouvrir la rĂ©flexion sur des concepts de solutions, avec lâobjectif de retenir 3 concepts principaux, dans une dĂ©marche dâinnovation.
Les Ă©tudiants devaient alors prendre en compte un panel plus large dâutilisateurs, tels que les gestionnaires de la gare pour aborder les questions de coĂ»ts de maintenance des supports dâinformation, les contraintes techniques, les problĂ©matiques dâaccueil du public et de communication de lâinformation voyageur.
La technique de brainstorming en mode « pop-corn » a Ă©tĂ© utilisĂ©e dans chaque groupe, avec un Ă©tudiant qui animait et les autres qui, par associations dâidĂ©es, proposaient des mots ensuite retranscrits sur des post-its. Lâanglais, langue utilisĂ©e pendant les 2 jours du workshop, sâest rĂ©vĂ©lĂ©e ĂȘtre une contrainte limitante pour cet exercice. Les participants, en majoritĂ© francophones, ne maitrisait en effet pas suffisamment la langue pour lĂącher prise et sâexprimer de façon intuitive. Cette Ă©tape clĂŽturait le workshop. Chaque groupe a ainsi dĂ» rĂ©aliser un rendu du format quâil souhaitait, prĂ©sentant les concepts et la solution retenue.
Etape 4Â : Prototypage (POC) et Ă©tape 5Â : Test
Nous avons dĂ» nous arrĂȘter avant les deux derniĂšres phases, de prototypage et de test pour les raisons suivantes :
- Le prototypage et le test usagers sont des sujets déjà maßtrisés par les étudiants. Ils allaient donc se retrouver dans leur zone de confort, en travaillant sur des phases du projet pour lesquelles ils ont déjà de la pratique.
- Dans le cadre de la mĂ©thode Design Thinking, câest la dĂ©finition du problĂšme qui est dĂ©terminante et qui nâest habituellement pas traitĂ©e suffisamment en profondeur par les Ă©tudiants en design. Le problĂšme devait donc dâabord ĂȘtre bien posĂ©, avant de se lancer dans les Ă©tapes suivantes.
Il pourrait ĂȘtre envisagĂ© de rĂ©aliser ces deux derniĂšres phases du projet en autonomie sur une prochaine session de workshop. Sur la base des rendus effectuĂ©s pour les 3 premiĂšres Ă©tapes, il serait en effet possible de continuer le workshop en faisant faire aux Ă©tudiants un POC des solutions, puis de le faire tester en documentant les rĂ©sultats.
3. Perspectives et améliorations
La nécessaire adaptabilité
Les Ă©tudiants ont Ă©tĂ© surpris dâavoir passĂ© autant de temps Ă bien dĂ©finir le « vrai » problĂšme usager alors quâils sont habituellement tentĂ©s de se concentrer directement sur les solutions. Ils ont pris collectivement conscience de lâimportance de cette Ă©tape.
Nous avons dâailleurs rĂ©alisĂ© que le problĂšme usager avait Ă©tĂ© mal posĂ© par les Ă©tudiants le premier jour et avons suivi nos intuitions en adaptant le programme du deuxiĂšme jour pour revenir sur la phase dâinspiration et prendre plus de temps sur la dĂ©finition du problĂšme.
A retenir pour de futurs workshops :
Langue du workshop
- Si lâon conserve lâanglais, comme langue principale du workshop, une autre mĂ©thode de crĂ©ativitĂ© est Ă envisager, plus systĂ©matique, de type SCAMPER.
- Si le workshop est en français, il faut essentiellement des francophones en langue maternelle.
Apport théorique
- Lâapprentissage dâune mĂ©thode trĂšs sĂ©quencĂ©e, telle que celle du Design Thinking, nĂ©cessite un temps dâappropriation pendant lâatelier. La diffusion du contenu thĂ©orique rĂ©alisĂ©e sur de courtes sĂ©quences dissĂ©minĂ©es juste avant les phases dâapplication en groupe a Ă©tĂ© particuliĂšrement apprĂ©ciĂ©e des Ă©tudiants. Lâalternance thĂ©orie / pratique sur des temps courts est Ă retenir comme bonne pratique pour de futurs workshops.
Article rédigé par Marine Semichon et Damien Brosseau.
Crédits photographiques : Damien Brosseau.